Filtrer
Support
Éditeurs
Langues
Prix
GALLIMARD
-
Entrevoir ; le front contre la vitre ; la halte obscure
Paul de Roux
- GALLIMARD
- Poesie Gallimard
- 23 Janvier 2014
- 9782070453368
Paul de Roux, né à Nîmes en 1937, est l'un des représentants les plus singuliers de ces poètes apparus dans les années 80, qu'on a appelés «néo-lyriques» ou encore «poètes du quotidien». S'il fait ses premiers pas dans La Traverse, revue de création littéraire qu'il fonde en 1969 avec quelques amis dont Pierre Leyris, Bernard Noël, Georges Perros et Henri Thomas, et qu'il arrête en 1974, Paul de Roux ne publie son premier recueil, Entrevoir, qu'en 1980, à l'âge de quarante-trois ans. Mais d'emblée, son champ poétique est conquis, sa voix assurée : usant du vers libre avec un art subtil, une langue dépouillée, lumineuse et de peu d'envolées lyriques, Paul de Roux façonne une poésie contemplative et sensuelle qui fait de la présence au Présent un art de vivre. Dans les plus petites choses de la vie ordinaire, les faits les plus ténus, les figures de rencontre, les variations du ciel, il s'attache, le front contre la vitre, à débusquer les signes d'une vie plus haute et plus substantielle, cette «vraie vie» dont Rimbaud disait qu'elle «est absente». Des signes qui sont aussi, pour le citadin assoiffé de lumière qu'il est, l'ultime «recours» contre la fatigue, l'usure, la solitude et la déréliction de ces haltes obscures qui sans cesse menacent le vivant.
-
«Le temps s'est arrêté avec un dernier coup de pinceau de Rembrandt. Vous ne bougez pas, Bethsabée, vous ne parlez pas, indifférente à cet homme qui, régulièrement, vient vous voir dans le grand musée, mêlé à la foule des touristes. Il vous parle de vous. Il interroge vos traits, votre corps, la façon dont vous vous tenez, tout ce qui pourrait lui révéler quelque chose de vos sentiments, de votre histoire. Mais, vous parlant, peut-être veut-il aussi parler d'une autre femme, de celle qui s'est éloignée et dont la figure se dessine en filigrane des notes fiévreuses qu'il vous adresse ? Un jour lui répondrez-vous ? Ou lui répondez-vous déjà ?»
-
Ce cinquième livre de poèmes de Paul de Roux évoque l'été, les jardins en fleur, la mer clémente au nageur, les longues journées où la vie semble portée par une ardeur nonpareille. Mais le «soleil dans l'oeil», c'est aussi la passion amoureuse, son aveuglement consenti. Un pétale de rose sépare alors le délice de vivre du déchirement et du deuil. Une femme comme une voile blanche s'élance du plus loin de l'allée et vient vers moi et ses jambes, d'un pas vif, circonscrivent les secondes qui enclosent notre rencontre : ce fut celle aussi du soleil enflammant ses cheveux, monnaie d'or - la Fortune passait près de moi.
-
«Chaque matin, et quel que soit le temps, Hélios nous prend dans ses bras : "Tout est à voir", dit la lumière qui éclaire la tuile fêlée, la mouche, ce visage émacié, la pariétaire des vieux murs, les pigeons en quête de miettes, et nous cherchant le regard des dieux dans tout cela qu'effleure le soleil.»
-
Dans la seconde moitié du XII? siècle, un enfant des steppes, orphelin de père, exclu de son clan et condamné à vivre une vie errante, va unifier la Mongolie et se lancer à la conquête du monde. Comment, à la suite de Gengis Khan et de ses successeurs, quelques milliers de cavaliers nomades parvinrent-ils à créer le plus vaste empire de tous les temps ? À l'époque de sa plus grande extension, l'Empire mongol couvre, outre l'Asie centrale et le sud de la Sibérie, la Chine et la majeure partie de l'Asie du Sud-Est, l'Iran, l'Irak, la Syrie, toutes les steppes de la Russie et de l'Europe orientale. Comment ce petit peuple a-t-il pu accumuler autant de conquêtes ? Par sa force physique et sa discipline, sa cavalerie sans égale ; par le génie de ses chefs et la propagande, la terreur que semaient ses hordes déferlantes. Mais aussi en sachant rallier les peuples asservis, déployer une intense activité diplomatique, se doter d'une administration efficace, établir l'ordre et la paix, se montrer d'une remarquable tolérance religieuse. Jean-Paul Roux nous entraîne au coeur de la plus prodigieuse épopée que le monde ait connue, de cet empire dont les voyageurs européens revenaient émerveillés.
-
Le prix des poèmes de Paul de Roux réside dans l'alliance très subtile d'un regard aigu et d'une sensibilité très fine. Le poète marie le concret et l'indicible, le sentiment des choses et les choses du sentiment. Ses poèmes donnent à voir avec une précision extrême, un don de la touche juste, une présence de la nature, des saisons, des lumières qui sont peu fréquentes. Il y a en même temps la sensation du silence derrière les choses, des états intérieurs fragiles suggérés avec un grand bonheur d'expression. Ce murmure sûr de lui-même, «voix amenuisée qui ne se résigne pas au silence», dit les choses avec mesure, sans lassitude, avec foi, comme une prière.
-
Paul de Roux, dont le talent s'était affirmé en 1980 avec Entrevoir, un recueil publié dans «Le Chemin», a réuni une centaine de poèmes. Sa manière s'est encore affinée. Avec délicatesse, mais sans pose ni mièvrerie, il s'inspire des événements les plus ordinaires, les plus quotidiens, dans leur variété. Chaque poème, assez bref, est une sorte de méditation concrète sur une simultanéité de perceptions et d'émotions dont il nous fait sentir les affinités. Elles ouvrent un espace indéfinissable mais profond entre les mots les plus simples. On effleure ainsi un courant secret de la vie, nous reliant à celui de mille histoires qui commencent et s'achèvent. On est porté d'une rive sombre à une rive obscure, au-dessus de cet espace vibrant et éclairé.
-
«Le moment le plus doux fut l'attente du bus, les tables du petit café étant à l'ombre des arbres du square où la brise de mer se coulait insidieusement et là je bus un café frappé avant de quitter Gythion, qui ne me réserva guère que ce plaisir éphémère - mais n'est-ce pas l'estampille du plaisir ?»
-
Après Entrevoir (1980) et Le front contre la vitre (1987), ce nouveau recueil de Paul de Roux, qui rassemble près d'une centaine de poèmes, vient souligner à la fois l'unité de ce qu'on peut appeler maintenant une oeuvre, et la capacité de renouvellement de son auteur. Mais sans ostentation ni virage : par la maîtrise croissante d'une expression qui n'a cessé de gagner en force persuasive, tandis qu'elle semblait se faire plus transparente et plus discrète. La justesse est partout : dans les images qui ne sont jamais sollicitées pour elles-mêmes ; dans la retenue sans crispation de la phrase ; dans le vers qui, aussi peu réductible à la prose qu'à un mètre régulier, définit souplement sa propre mesure. Avec une sorte d'assurance tâtonnante, les poèmes de Paul de Roux épousent le mouvement délicat mais irrésistible qui fait s'y matérialiser les mots, comme font les objets, les pensées et les émotions dans la lumière de l'aube.
-
La halte obscure Au loin, comme dans une campagne, le chant du merle, l'espace à l'aube s'apaisant, s'ouvrant, laissant passer cette voix fraîche quand peu de lampes brillent contre le front noir de la ville, sous le ciel aux brumes, aux ondées - et ces lampes on voudrait les éteindre:qu'il n'y ait que la nuit et le chant, l'illusion d'un espace plus proche que la pluie sur le toit.